Pourquoi mettre en place des services de SRAJ ?

Répondre à une demande des usagers du dispositif de RAD majoritairement constitués de jeunes

C’est au cours de la jeunesse que les personnes font l’apprentissage de la sexualité et acquièrent les compétences et les connaissances qui devraient leur permettre de vivre une sexualité éclairée et respectueuse de soi et des autres. Selon le programme d’action élaboré lors de la Conférence Internationale sur la Population et le Développement (CIPD) du Caire en 1994, accéder à une information complète en matière de Santé Sexuelle et Reproductive (SSR) est un droit des personnes et en particulier des jeunes et des adolescent(e)s « afin qu’ils apprennent à assumer leur sexualité de façon positive et responsable ». Ainsi, il préconise de développer des programmes d’information et d’éducation en direction des jeunes, et en particulier les adolescent(e)s, afin de prendre en charge leurs problèmes de SSR, dont les grossesses non désirées, les avortements à risque, les IST ainsi que le VIH et le Sida.

Une population jeune cumulant les vulnérabilités

Au Burkina Faso, 48% de la population ont moins de 15 ans. On estime que d’ici 2020, l’effectif de la population des jeunes âgés de 15 à 24 ans sera multiplié par au moins trois par rapport celui de 1985. Aujourd’hui, les jeunes âgés de 15 à 24 ans représentent 20 % de la population du pays (INSD, 2015). L’ensemble des données sur cette frange de la population s’accorde à confirmer qu’elle constitue le groupe de la population qui cumule le plus de vulnérabilité en lien avec la Santé Sexuelle et Reproductive comprenant la Planification Familiale (PF).

Selon les sources du Plan national de développement sanitaire (PNDS) 2011-2020, la situation de la santé des adolescents et des jeunes est influencée par des grossesses précoces et non désirées, des avortements provoqués clandestins, des rapports sexuels précoces et non protégés, le multi partenariat, une prévalence élevée du VIH,SIDA et IST et de violences diverses. Le phénomène est aggravé par la faible utilisation des méthodes contraceptives et des services de santé par les jeunes. De façon globale, l’insuffisance d’offre de services de santé de la reproduction adaptés aux adolescents contribue largement à la situation précaire de leur état de santé. Des centres jeunes existent pour apporter une réponse aux préoccupations des jeunes, mais sont actuellement inégalement répartis sur le territoire national. L’offre est beaucoup plus concentrée en milieu urbain.

Selon l’EDSBF-MICS 2010, plus d'un quart des jeunes filles de 15-19 ans ont déjà commencé leur vie féconde. A l'âge de 17 ans, une jeune fille sur cinq a déjà commencé sa vie féconde et à 20 ans cette proportion est de 59%.Une étude réalisée[1] sur les grossesses non désirées en milieu scolaire en 2013, a révélé qu’au cours de l’année scolaire 2011-2012, 1056 élèves du primaire et du post-primaire sont tombées en grossesses (dont 40 cas pour le primaire). Selon le tableau de bord de la santé de 2013, le nombre d’avortements enregistrés dans les formations sanitaires en 2013 est de 28 987 contre 26 518 en 2012, soit une hausse de 9,3%. Ce nombre en 2013 représente 3,7% des grossesses attendues. Les régions des Hauts-Bassins et du Centre enregistrent les plus grands nombres d’avortements avec respectivement 4 372 et 3 947 cas. L’ampleur des avortements clandestins est très importante car 34,0% des avortements seraient liés à des grossesses non désirées[2]. Le faible accès aux services de sante conviviaux par les jeunes et adolescents, la faible utilisation des services de santé, les comportements sexuels a risque, l’insuffisance d’information et d’éducation complète appropriée en fonction de l’âge, les violences et transactions sexuelles, les tabous sexuels, l’influence des medias et des TIC, la démission de certains parents face à leur responsabilités, la réticence de certaines religions à promouvoir les méthodes de contraception, la sous-information des jeunes et adolescents sur les questions de santé reproductives, et l’insuffisance de leur encadrement peuvent être entre autres des fondements des comportements de ces jeunes. Ce qui nécessite alors un renforcement des actions de sensibilisation sur la santé sexuelle et reproductive à l’endroit des jeunes à tous les niveaux.

Les barrières empêchant l’accès aux services

Dans certains pays comme le Burkina Faso, les obstacles s’accumulent pour les personnes qui doivent accéder aux soins : les difficultés à trouver certains médicaments, les ruptures de stock, l’absence d’infrastructures sanitaires, le manque de personnel médical qualifié, ou encore les longues distances à parcourir pour atteindre un centre de santé souvent aggravées par le contexte d’insécurité. Si on y ajoute encore le manque d’argent et le coût élevé des soins, il apparaît crucial d’apporter des solutions concrètes et adaptées à ces populations qui ont d’autant plus besoin d’accéder quotidiennement aux soins qu’elles sont dans une situation de grande vulnérabilité.

L’augmentation de la frange de population jeune a entraîné une demande accrue de services, notamment d’information, en SSR et ce d’autant plus qu’elle s’est déroulée dans un contexte d’évolution sociale et sociétale favorable à l’émergence de nouveaux questionnements dans ce domaine. Par ailleurs, l’accès globalisé et multiforme au matériel à contenu sexuel entraîne un changement dans les pratiques et semble réitérer une sexualité à domination masculine. Les tabous et les normes socioculturelles peuvent empêcher non seulement l’accès à l’information sur la santé et les soins de SSR mais également l’élaboration même de politiques et programmes de santé répondant aux besoins de la population. Pour pouvoir proposer aux jeunes une information de qualité et adaptée à leurs problématiques, il est nécessaire que celles-ci soient identifiées.

La Relation d’Aide à Distance : un outil efficace et à moindre coût

L’accessibilité virtuelle pour la promotion et la prévention pourrait devenir un nouvel enjeu géographique et économique de la santé. Les dispositifs de Relation d’Aide à Distance (RAD) se positionnent dans cette nouvelle dynamique.

Le développement et l’accès aux Technologies de l’Information et de la Communication (TIC)  offrent aux acteurs de la promotion de la santé de nouveaux moyens pour répondre au niveau national à des défis de santé publique. Une approche novatrice telle que la Relation d’Aide à Distance (RAD) a été développée et expérimentée, d’abord, dans les Pays du Nord de l’Europe au début des années 90 par le biais notamment de Sida Info Service (SIS), en France. Elle a été adaptée par la suite, par les acteurs de la société civile dans les Pays africains. Au Burkina Faso, l’histoire et l’évolution de la pratique de la RAD sont restées fortement liées à celles du VIH/Sida. En effet, AFAFSI/BF a très vite compris que face à la menace du VIH/Sida, la pratique de la RAD s’avère être une approche pertinente et efficace parce qu’elle permet de toucher les publics diversifiés en matière de prévention (information, sensibilisation) et de prise en charge (écoute, orientation, soutien, veille et alerte). Les principes fondamentaux qu’elle promeut (anonymat, confidentialité, non jugement et gratuité), la prédisposent à être une approche se focalisant sur le respect et la promotion des droits de l’Homme.  

La RAD : un outil plurifonctionnel

L’expérience du Burkina Faso dans l’utilisation de la RAD a montré que les dispositifs de RAD en agissant sur le niveau de connaissance des populations sur les pathologies et sur les problématiques de santé publique, en potentialisant un système pérenne d’orientation, de référence et de contre-référence, en étant le premier niveau de soutien psychologique des usagers et en réduisant les coûts peut impacter durablement l’accès des populations aux services de santé. En effet, elle est un des moyens d’«autonomisation » des personnes dans un contexte de tabou sur les questions liées à l’intimité en mettant  en place des espaces protégés d’expression et d’information.

La RAD : une approche pour favoriser le témoignage (Observatoire)

Le rôle majeur d’observatoire en rendant compte des propos clés des entretiens (réaliser par le biais du téléphone ou de l’internet), peut permettre l’affinement des politiques publiques de santé.

Une analyse de l’utilisation de la ligne verte par les jeunes de 15 à 24 ans en 2017 montre que le thème sur la SSR représente 14% des thèmes qu’ils évoquent à la ligne. Ce thème constitue de ce fait le troisième thème le plus abordé après celui sur les généralités pathologiques (VIH, Ebola, IST, Hépatites…) et celui de « découverte » du dispositif. La SSR comprend des questions liées à la planification familiale (contraception, conception, grossesse, avortement) et à la connaissance du corps et l’éducation sexuelle.

 

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